Salvator Dali, tout un monde dans sa tête !

Pourquoi le peintre peint?

Rares sont les peintres qui peignent pour peindre ! L’acte de peindre est bien plus qu’un simple geste technique, il peut même devenir un processus viscéral qui pousse l’artiste à mettre en image ce qui l’habite, l’entoure ou le dépasse.
Analysons ensemble quelques raisons fondamentales de l’acte créateur.

Grotte de LASCAUX - Aurocs et chevaux

Comprendre les raisons de l'acte pictural

Claude Monet – Impression soleil levant – 1872
Peindre pour exprimer ses émotions

Mark Rothko : « Je ne suis qu’un intermédiaire entre la peinture et le spectateur. Celui qui pleure devant mes toiles ressent les mêmes émotions que moi lorsque je peins. »

Pour certains peintres, l’art est avant tout un moyen d’expression, voire un exutoire. L’important pour eux est de pouvoir extérioriser, voire littéralement évacuer leurs émotions, dans une forme de catharsis. L’acte de peindre relève d’un besoin profond, d’une pulsion presque primaire, archaïque, telle qu’on peut la trouver dans l’art brut. Il devient une sorte de médiateur entre le dedans et le dehors. On rencontre souvent des artistes, dans cette catégorie, attirés par les arts physiques tels que la sculpture, qui mobilisent les tripes et allient spontanéité, force, liberté, puissance ou encore mouvement.

L’art peut également devenir une sorte de thérapie, une tentative d’extériorisation de ce qui ne peut être dit autrement, permettant de projeter un monde intérieur souvent tourmenté. Vincent Van Gogh, qui a peint certains de ses chefs-d’œuvre en proie à la détresse mentale, écrivait : « Ce que je fais est l’expression de ma vie, de moi-même. » De son côté, Edvard Munch confiait : « L’art naît du désir de l’homme de se révéler et de crier sa détresse. »

Edward Munch - Le Cri
Peindre pour comprendre et questionner le monde

Certains artistes ne peignent pas uniquement pour exprimer leurs émotions, mais aussi pour mieux saisir la complexité du monde. À l’instar des surréalistes, ils utilisent l’image pour interroger la réalité : « Tout ce que nous voyons cache quelque chose d’autre », disait René Magritte. La peinture devient alors un outil de questionnement, un moyen de révéler ce qui échappe à l’œil nu, un morceau de sociologie ou d’anthropologie. Wassily Kandinsky, pionnier de l’art abstrait, expliquait ainsi que « Tout art est un enfant de son époque. » Il voyait dans l’art une force capable de refléter les tensions et les aspirations d’un temps donné.

L’artiste peut aussi partager ses questionnements avec le regardeur. Ce tableau, par exemple, permet de réfléchir à la notion d’ « art », à son essence, à sa raison d’être et plus spécifiquement à la question de la représentation.

René Magritte - Ceci n'est pas une pipe
Peindre pour se découvrir soi-même

Créer, c’est aussi un voyage intérieur, un moyen d’explorer son identité et ses propres limites. Alberto Giacometti, obsédé par la représentation de l’humain, confiait : « J’ai fait toute ma vie la même sculpture, en essayant de comprendre ce qu’est un être humain. » Peindre permet à l’artiste de se confronter à lui-même, de traduire en images ce qu’il ne sait pas toujours mettre en mots.

 

Joan Miró, qui oscille entre abstraction et surréalisme, déclarait : « Ce que je cherche, c’est un point de départ, un point d’où je deviens. » Dans cette optique, l’acte de peindre n’est jamais figé ; il est une quête, une progression constante. Pierre Soulages, maître du noir, expliquait : « Ce que je fais m’apprend ce que je cherche. » La peinture devient un dialogue permanent entre l’artiste et lui-même, entre ce qu’il pense être et ce qu’il découvre au fil de son œuvre.

Une regardeuse devant une oeuvre de Pierre Soulages
Peindre pour laisser une trace et exister

Le premier exemple qui me vient en tête pour illustrer ce besoin est certainement l’art pariétal. Nos ancêtres, entre autres raisons, ne cherchaient-ils pas à laisser une trace de leur passage ? Derrière l’acte de peindre, il y a souvent le désir profond de durer, de survivre à travers l’image. Francis Bacon, obsédé par la fugacité de la vie, déclarait : « Je peins pour me survivre. » L’art permet de figer le temps, d’inscrire une émotion, un moment, un regard, dans l’éternité.

Jean-Michel Basquiat, qui peignait avec une frénésie quasi compulsive, disait : « Je veux que mon œuvre ait du sens, qu’elle soit importante. » Peindre est donc une manière de marquer l’histoire, d’affirmer son passage sur terre. Pour Marc Chagall, ce besoin de laisser une empreinte allait de pair avec la transmission d’un héritage émotionnel : « Si toute vie va inévitablement vers sa fin, nous devons durant la nôtre la colorier avec nos couleurs d’amour et d’espoir. »

Grotte de LASCAUX - Aurocs et chevaux
Peindre pour créer un autre monde

L’art permet de créer, pour certains artistes, un univers privilégié, un monde à part, loin, très loin du monde réel. C’est un monde magique dans lequel ils plongent. En tant que regardeurs, nous pouvons avoir la sensation de nous trouver dans un endroit merveilleux, une sensation de « sans limites », d’osmose, ainsi qu’un sentiment de possible. La peinture est un moyen pour l’artiste de transcender la réalité, de proposer une alternative au monde tel qu’il est. Il peut voir dans la peinture un espace de liberté totale, où tout devient possible.

Certains peintres recherchent, dans cet autre monde, une harmonie, une fusion parfaite et entière avec l’art pratiqué. Le musicien peut chercher, dans son instrument, à percer tous les secrets techniques : il devient le prolongement parfait de la main, sans distinction ni séparation. Le sculpteur peut trouver dans l’argile un second corps avec lequel s’unir. L’artiste entretient une relation presque amoureuse avec son art et avec le médium choisi. L’univers artistique est alors une sorte de refuge, de cocon.Henri Matisse, entrant, je pense, dans cette catégorie d’artistes, voulait peindre un monde apaisé : « Ce que je rêve, c’est d’un art d’équilibre, de pureté, de tranquillité. »

D’autres, au contraire, utilisent le tableau comme une arme, à l’instar de Pablo Picasso, affirmant que « La peinture est un instrument de guerre offensive et défensive contre l’ennemi. » Chaque peintre, selon son époque et sa sensibilité, façonne ainsi une nouvelle réalité, une vision personnelle du monde.

 

En peignant, les peintres ouvrent une fenêtre…

Nous l’avons vu, peindre est un acte fondamental, une nécessité presque vitale pour ceux qui s’y consacrent. Que ce soit pour exprimer leurs émotions, comprendre le monde, se découvrir, laisser une trace ou inventer une nouvelle réalité, les artistes donnent forme à l’invisible et offrent aux spectateurs un miroir de l’âme humaine.

En définitive, chaque peinture est une fenêtre ouverte mais non comme le disait Alberti, sur le monde, mais plutôt sur une vision unique du monde – celle d’un individu qui, par l’acte de créer, tente de saisir un peu du mystère de l’existence.

Et vous, pourquoi regardez-vous ce que... le peintre a peint?

La prochaine fois que vous serez face à une œuvre, demandez-vous pourquoi vous regardez les tableaux, pourquoi vous allez au musée, pourquoi vous poireautez des heures pour aller voir une « grande expo » et tirez-en vos conclusions.

Et pour compléter vos hypothèses et votre analyse d’un tableau, procurez-vous la méthode complète ou téléchargez gratuitement le pense-bête Art-toi..

ART-TOI et vois plus et mieux !

2

Questionnez votre tableau

2

Questionnez votre tableau

2

Questionnez votre tableau