L'automatisme, un art sur le divan ?

Pour commencer, définissons ce qu’est l’automatisme dans l’art. En simplifiant, on pourra dire que l’objectif de l’automatisme est de saisir ce qui se passe dans l’esprit du peintre dans l’instant, aussi directement que possible. Ce terme désigne une technique dans laquelle l’artiste laisse son inconscient prendre le contrôle. Popularisé au XXe siècle par les artistes surréalistes qui cherchaient à libérer leur pouvoir créatif, l’automatisme a vite été considéré comme le seul moyen de se détacher des contraintes culturelles et intellectuelles, des dictats de l’art, du joug historique et de révéler la personnalité de l’artiste au plus profond de lui-même. Nous y voilà : « libérer et révéler la personnalité de l’artiste ». Mais à qui ? A lui-même ou au regardeur de son œuvre ? N’entre-t-on pas avec cette technique dans une sorte de psychanalyse du créateur, de sa production, voire un moyen pour le spectateur d’y projeter sa psyché ?

L’art sert-il la psychanalyse ?

La psychanalyse s’est invitée très tôt dans le milieu artistique, car elle traite de ce que peut apporter l’art au psychisme humain : rendre conscient ce qui ne l’est pas, révéler la profondeur des sentiments, l’intensité des émotions, lever les refoulements. Le principe de l’association libre en psychanalyse s’est retrouvé assez logiquement dans les thérapies et notamment l’art-thérapie.

Mais alors l’art-thérapie, c’est un peu de l’art, non ?

Bien sûr, les surréalistes ont pratiqué l’automatisme comme le propose l’art-thérapie, c’est-à-dire en recherchant la spontanéité de la création, en appelant la force créatrice de l’inconscient.

Placez-vous dans l’état le plus passif ou réceptif que vous pourrez, écrivez (ou peignez) vite sans sujet préconçu, assez vite pour ne pas se retenir ni pour corriger. Manifeste du Surréalisme, André Breton.

C’est vrai que l’art-thérapie propose une expérience créatrice permettant une expression de soi non verbale sous différentes formes : métaphorique, symbolique, sensorielle. La production est aussi un vecteur de communication.

Mais c’est la production elle-même qui est prise en compte en art-thérapie, pas son résultat, elle est un moyen non une fin. Et d’autres facteurs différencient l’art de l’art thérapeutique.

L’art est culturel

L’art n’est pas uniquement un mode d’expression, il est aussi culturel, un révélateur social et culturel de son époque et de son histoire. Intimement lié et relié à notre environnement, l’art est le portrait en creux de la société dans laquelle émerge la création.

L’art produit une œuvre

L’art produit une œuvre qui repose sur un équilibre instable entre transgression, soumission et sublimation. Même si l’artiste ne cherche pas à produire de l’art, une œuvre le devient (ou pas) même sans volonté d’en « faire une œuvre », sans que s’en soit la finalité.

L’art ne sert pas à guérir

Si certains praticiens postulent que l’art guérit, ce n’est pas sa vocation. Oui, l’art peut être thérapeutique. Pour celui qui le regarde, il peut avoir une vocation d’éclairer le monde environnant et provoquer un catharsis. Les mouvements, les images, les sons, les formes, les couleurs favorisent un espace de liberté psychique. Pour les artistes, le processus de création peut agir comme un processus de libération, d’extériorisation de sentiments ancrés, voire de transformation. Mais à la différence de l’art-thérapeutique, l’art n’a pas pour vertu, pour finalité de soigner.