Le Trompe-l’œil, ça trompe énormément !

Dans la peinture murale, on peut figurer une architecture pour donner une impression d’espace ou de perspective. Des pilastres, des colonnes, une vue offriront l’illusion d’une ouverture à un mur borgne par exemple.

Dans le cas d’une représentation très réaliste d’un élément mobilier comme un panneau de bois, une image punaisée au mur, une enveloppe décachetée tenue par un ruban ou encore une carte à jouer coincée dans un angle de bois, il s’agit également de donner une illusion, de tromper l’œil et non de simplement représenter.

Et maintenant, reprenons l’exemple du tableau de Pere Borrell de Caso Fuyant la critique. Le petit garçon enjambant la fenêtre, le cadre du tableau sert simplement à donner l’illusion que le cadre n’est pas un cadre, que le tableau n’en est pas un. La représentation de moulures et de fenêtres entourant un décor sert à prolonger la réalité. En revanche, une vue en perspective dans un cadre est une représentation.

On le voit grâce à ces deux critères, le trompe-l’œil naît de la volonté de tromper, de donner une illusion, de prendre des vessies pour des lanternes. Dans certains cas, il aménage des espaces architecturaux qui n’existent pas, dans d’autres, il joue de la confusion du spectateur en lui faisant voir des objets là où il n’y en a pas.

Cette volonté l’emporte sur l’esthétique. Le trompe-l’œil s’amuse de la crédulité du spectateur, souvent consentie par ailleurs. Cette illusion pourra encore être renforcée si le tableau est placé dans un élément mobilier qui en prolonge le sujet comme une porte ou un mur du même matériau que celui de sa représentation.

Mais quel est le but, sinon l’intérêt de peindre des trompe-l’œil ?

La réponse diverge selon l’époque et la destination des œuvres.

Dans l’Antiquité romaine, le trompe-l’œil permettait d’agrandir et d’enrichir de manière peu onéreuse les intérieurs des architectures privées ou publiques.

Au Moyen-Âge et à la Renaissance, ce sera un moyen de créer l’illusion d’éléments architecturaux où il n’est pas possible d’en créer. Et le plus célèbre d’entre eux est probablement le plafond de la chapelle Sixtine.

Dans les pays du Nord et les Pays-Bas en particulier, on observe une longue tradition de nature morte en trompe-l’œil. Jacopo de Barbari, Vénitien installé à Vienne, en serait un des précurseurs avec son œuvre Perdrix aux gants de fer. Elle a pour but d’investir la troisième dimension, de jouer avec l’illusion du relief. Certains peintres s’en sont même fait une spécialité, poussant la mimesis jusqu’à la perfection, ils signaient là leur carte de visite de Maître de l’illusion. En plus de surprendre le visiteur, on peut également imaginer que les peintres se plaisaient à montrer leur savoir-faire, leur art.

Beaucoup plus proches de nous sont les surréalistes et Magritte en particulier. Un ciel de jour dans une scène de nuit, contraste troublant, mais si proche de la réalité que le peintre semble nous interroger : « Tu me crois quand je te donne cela à voir ? »