Analyse du tableau : Comprendre Les Epoux Arnolfini…de Jan van Eyck

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Catherine Hahn

Auteure du livre : La Peinture, enfin j'y vois quelque chose !

Comprendre Les Epoux Arnolfini…
de Jan van Eyck

Un léger strabisme, des pantoufles jetées dans un coin, une scène dans une chambre à coucher avec des protagonistes habillés pour aller au bal… Les Epoux Arnolfini sont aussi connus que mystérieux. Tâchons de les comprendre un peu mieux !

Comprendre le contexte du tableau

Pour comprendre le contexte dans lequel s’inscrit l’œuvre de Jan Van Eyck, nous allons puiser des informations sur Internet et dans les nombreux ouvrages dédiés à cette époque, le XVe siècle et plus particulièrement à ce peintre fameux.

Quel est le contexte de l’époque de Van Eyck ?

Jan van Eyck nait probablement à Maaseik dans l’Est de l’actuelle Belgique, territoire soumis à l’autorité de l’évêché de Liège vers 1390. On lui connaît deux frères et une sœur. Hubert, peintre, installé à Bruges, entamera la réalisation du retable de L’Agneau mystique à Gand que son frère terminera après son décès en 1426. Lambert, lui aussi peintre, travaillera pour le duc de Bourgogne tandis que Marguerite, active elle aussi à Gand, assistera Hubert. En termes d’études, on pense que Jan lisait le latin et peut-être un peu le grec et qu’il connaissait bien les œuvres de Pline l’Ancien dans lesquels il avait appris les propriétés des couleurs et quelques principes de géométrie. Tout d’abord employé comme peintre de cour et valet de chambre pour le prince-évêque de Liège Jean III de Bavière, il rejoint la cour de Philippe Le Bon, duc de Bourgogne à la mort de son protecteur en 1425. , Basé à Bruges, ses fonctions sont multiples : pèlerinage en Terre sainte, mission diplomatique à Valence puis un voyage au Portugal pour demander la main de la fille du roi Jean 1e, Isabelle. Il réalisera deux portraits de la future duchesse qui plurent à l’évidence puisque le duc de Bourgogne épousera le modèle ! En dépit de ses nombreux voyages, Van Eyck s’établit à Bruges de façon permanente vers 1430 et y ouvre un atelier. Il y réalisera des commandes tant pour la ville que pour le duc tout en honorant celles de commanditaires privés. Il y meurt en 1441.

Quel est le statut du peintre ?

Dans les années 1430, Van Eyck bénéficie d’un statut atypique pour l’époque : peintre de cour, il dirige également un atelier sans pourtant appartenir à une guilde ni jamais acquérir le droit de bourgeoisie. Ce statut particulier lui permet une liberté certaine : répondre aux commandes du duc de Bourgogne et en même temps jouir de celles d’une clientèle privée.

Mais qu’est-ce qu’un peintre de cour au XVe ? L’artiste est en quelque sorte salarié par la cour et peut recevoir des paiements pour des missions particulières. Van Eyck percevant tant une rente annuelle que des « commissions », il jouissait indéniablement d’une aisance financière. De plus, ses voyages diplomatiques lui offrirent l’opportunité de découvrir d’autres manières picturales et de diffuser son art et ses techniques. 

Et qu’en est-il de son atelier ? Loin d’être clos, c’est un endroit où on travaille mais aussi où l’on exhibe ses réalisations, un lieu où on rencontre des clients et des commanditaires et vend sa production personnelle.

Qui sont les clients et commanditaires de Van Eyck ?

Bruges est une ville riche à cette époque qui tient sa vitalité économique tant à la présence de marchands étrangers que par la production de draps. Grâce à ces activités hautement lucratives, une nouvelle classe sociale fait son apparition ; la bourgeoisie marchande. Celle-ci s’impose en adoptant les usages des aristocrates ayant notamment pour habitude de se faire immortaliser sur un tableau. Pour faire face à la demande grandissante de peintures, les ateliers se multiplient. Les clients et commanditaires de Van Eyck sont ainsi issus de trois classes sociales :

  • L’entourage du prince

Grâce à sa position de peintre de cour, Van Eyck se verra attribuer une commande de Nicolas Rolin, alors chancelier du duc de Bourgogne. Le peintre le représentera en prière, agenouillé, mains jointes au-dessus d’un livre d’heures face à la Vierge avec l’Enfant sur les genoux. Ce tableau permettra au chancelier d’asseoir sa position sociale. 

  • Les marchands italiens

Le deuxième groupe de commanditaires est composé de marchands italiens. Au moins six tableaux soit le quart de la production de Van Eyck peuvent leur être associés, deux pour des Gênois et quatre pour des Lucquois dont les Arnolfini font partie. Bien que nés en Toscane, cette famille, comme beaucoup d’autres marchands étrangers passeront l’essentiel de leur vie à Bruges.

  • L’élite brugeoise

Le troisième groupe d’acheteurs est l’élite brugeoise représentée par le clergé, les artisans du luxe (les orfèvres notamment) et les amateurs d’art.

Dans quel courant artistique l’œuvre de Van Eyck s’inscrit-elle ?

Le peintre est-il l’un des derniers artistes du Gothique international ou déjà un pionnier de la Renaissance ? Eh bien, on pourra parler d’un style hybride dans toutes les œuvres de Van Eyck et plus particulièrement dans les Epoux Arnolfini. Du gothique, il garde l’aspect frêle et étiré des figures, les représentations architecturales du Nord de l’Europe et une posture encore hiératique. De la Renaissance, il innove avec le sujet ; le portrait des commanditaires sans figuration de la Vierge ou d’un saint, un réalisme accru notamment dans les détails, des jeux de lumière et une perspective géométrique bien qu’encore maladroite. Et il signe ses œuvres. Ce sont ces innovations notamment qui feront la gloire de ce peintre.

En quoi Van Eyck innove-t-il ?

Jan Van Eyck apporte des innovations dans trois domaines picturaux :

Un genre pictural et un sujet bien audacieux pour l’époque 

Dans l’histoire de la peinture, cette œuvre constitue le premier portrait « bourgeois » de l’histoire de l’art. L’artiste représente ici monsieur et madame Tout-le-monde : l’habitant d’un bourg, ni, Dieu, ni saint, ni même souverain mais simplement un marchand italien et son épouse. Plus que l’Homme en tant que sujet pictural, c’est ici l’Individu que l’artiste représente. Les Arnolfini sont ainsi peints pour eux-mêmes : ils sont le sujet du tableau. 

 

Une volonté de représenter une vraie scène avec force détails

C’est aussi la première œuvre connue dans laquelle un artiste représente un intérieur bourgeois (et non un palais ou un lieu évoqué dans la Bible) et ce, avec force détails prouvant qu’il s’agit bien là d’une maison réelle. Sandales de bois boueuses, fenêtres à vitraux ronds, chapelet, animal domestique, rien ne manque. La richesse de la représentation des objets qui composent le décor n’est pas un hasard : les Flamands fiers du confort de leurs intérieurs, de leurs meubles et de leurs bibelots n’hésitaient pas à les faire figurer dans les tableaux religieux par exemple. En revanche, ce qui est nouveau est le fait que les protagonistes soient représentés dans leur propre intérieur, plus encore dans leur chambre, entourés de leurs objets quotidiens. 

 

La technique de la peinture à l’huile perfectionnée

S’il n’a pas inventé, comme on l’entend souvent, la technique de la peinture à l’huile, Van Eyck l’a amenée à un degré de perfection qui lui permit de représenter tous les éléments du tableau avec beaucoup de précision et de minutie ; plis des vêtements, reflets de la lumière naturelle sur les perles de verre, détails du lustre, on est loin des drapés ampoulés, des objets plus décrits que peints, des postures convenues du Gothique.

 

Le rendu en 3D

Pour terminer, Van Eyck a cherché à rendre la 3e dimension vraisemblable. Pour y parvenir, il va jouer avec la lumière, utilisant son reflet sur les formes pour les modeler, ombrant les parties non exposées des objets ou encore nimbant légèrement les éléments placés plus loin. On voit aussi une perspective géométrique apparaitre. Plusieurs points de fuite coexistant dans la représentation spatiale, elle est encore maladroite et aura une fonction plus symbolique que naturaliste. 


Ce sont probablement ces innovations qui rendront Van Eyck aussi célèbre qu’apprécié. Et c’est peut-être dans la difficulté à interpréter ce tableau en particulier, le rendant mystérieux qui fera particulièrement son succès jusqu’à aujourd’hui.

Comprendre le tableau

Maintenant que le contexte historique est posé, penchons-nous sur l’œuvre dont cet article est l’objet pour découvrir les usages du quotidien de ce couple de bourgeois du XVe siècle.

Que voit-on dans cette œuvre ?

Van Eyck peint ici un couple en pied dans une chambre. L’homme porte un chapeau de feutre noir quelque peu démesuré. Son corps étroit et raide est couvert par une veste noire matelassée qui part du cou et qui va jusqu’à la ceinture aux poignets brodés. Au-dessus, il porte une huque (robe portée par les hommes au Moyen Âge) de velours violet dont les bords sont garnis de fourrure. Ses pieds sont enveloppés dans des chausses. Son teint est pâle, son expression distante, son nez allongé à l’extrême et son regard présente un léger strabisme. Son bras est tendu vers celui de la femme. Sa paume, tournée vers le ciel, accueille la main sans la serrer. La femme est vêtue d’une robe bleue et d’un surcot vert bordé de fourrure grise. Elle ramène la traîne sur son ventre. Plus pâle encore que son mari, l’épouse a les yeux baissés. Son front dégagé est très visible. Un truffau (tresses formant des bourrelets sur ses tempes) soutient une huve blanche aux bords résillés, coiffure des épousées. Deux colliers agrémentent son cou. La documentation nous apprend que les vêtements de l’un comme de l’autre traduisent le luxe, l’élégance et la mode du XVe siècle. Au sol, sont posées deux paires de socques, sur-chaussures utilisées en extérieur permettant d’éviter de salir le bas des habits. Les personnages sont immobiles, adoptant une pose hiératique et solennelle.

Le couple est représenté dans un intérieur flamand témoignant du confort bourgeois par son décor et son mobilier. Van Eyck présente une salle largement baignée de lumière grâce à la fenêtre à meneaux, à gauche, ouvrant sur la ville de Bruges. Le lit à courtines, les sièges de bois sculpté garnis de coussins, le coffre sous la fenêtre sont des meubles fréquemment rencontrés. Toutefois, les vitres, le lustre ouvragé, le tapis posé sur le sol et surtout le miroir sont des éléments de luxe.

Quel est le sujet du tableau ?

Depuis plus de 150 ans, les historiens débattent du sujet de cette œuvre : qui sont les protagonistes, quel est le propos de l’artiste, quelle histoire est racontée ? Mais en l’absence d’informations factuelles concluantes, on ne peut que formuler des hypothèses. Aucune ne faisant consensus, elles coexistent et alimentent un débat vivace. En voici quelques-unes.

 

Une allégorie du mariage

L’un des premiers historiens de l’art flamand, Carel van Mander, y vit une métaphore célébrant le sacrement du mariage. Cependant, de nombreux chercheurs rejetèrent cette allégation, arguant que la peinture était trop réaliste pour être considérée comme une allégorie. Ils accréditèrent néanmoins l’hypothèse du mariage, développant des théories autour de cette thématique. Il pourrait donc s’agir d’une cérémonie de mariage, le tableau figeant les personnages au moment du serment marital de l’homme. En tant que spectateur du XXIe siècle, nous pourrions objecter qu’il n’y a pas de prêtre pour consacrer cette union. Pourtant, l’Eglise admettait, à l’époque, que le mariage est le seul sacrement ne nécessitant pas la présence d’un prêtre, cet acte pouvant être accompli en privé. Le rituel est simple : les futurs époux se donnent la main et l’homme doit lever l’avant-bras droit en signe de serment, devant témoin. Le reflet du miroir montrant deux personnages hors champ permet d’accréditer ce postulat.

 

Le tableau représente le mariage du peintre lui-même

C’est en raison de la signature énigmatique de l’œuvre que cette hypothèse a perduré jusqu’au milieu du XIXe siècle : Johannes de Eyck fuit hic 1434. En effet, jusque-là, on pensait que cette courte phrase se comprenait comme « Johannes de Eyck fut celui-ci 1434 ». On en conclut donc que le tableau représentait l’artiste et son épouse. Cette hypothèse a été renforcée par la ressemblance de la femme avec Margareta van Eyck, dont un portait est conservé au musée Groeninge de Bruges. Mais cette belle histoire a été remise en cause par le fait que l’homme ne ressemble pas à un autoportrait supposé du peintre : L’Homme au turban rouge.

Un mariage secret car Madame est enceinte

D’autres historiens ont avancé qu’il pourrait s’agir du mariage des deux personnages, célébré en privé, et dont Van Eyck serait le témoin (l’autre témoin étant l’homme dans le miroir). La main gauche de la femme, posée sur un ventre rebondi, annoncerait qu’elle est déjà enceinte (ce qui expliquerait le mariage en secret). Mais cette hypothèse ne tient pas la route non plus pour plusieurs raisons. D’une part, la mode était aux ventres proéminents, signe de fécondité. Pour y parvenir, les femmes ajoutaient des coussinets sous leur robe, afin de s’arrondir le ventre et plaçaient leur ceinture très haut, sous la poitrine. Ensuite, les vêtements, notamment le surcot, étaient amples et longs. Leur fonction était de tenir chaud, tout en permettant les mouvements. L’abondance de tissu était également une marque de richesse, puisque ceux-ci (brocarts, soieries, velours) étaient coûteux. Le geste de ramener la traîne du surcot sur son ventre était « à la mode », mais répondait aussi à une nécessité, celle de ne pas le salir ni de se prendre les pieds dedans en se déplaçant. Enfin, les règles de bienséance commandaient aux femmes de disposer, en public, leurs mains sur le ventre en signe de politesse et de discrétion. Encore raté.

 

Le mariage d’un certain Arnolfini

En 1861, l’historien d’art William H.J. Weale, dans ses Notes sur Jan van Eyck, sème le trouble. A l’origine, ce tableau n’avait pas de titre. Mais il apparaît dans des inventaires royaux comme représentant Arnoult Fin ou Hernoul le Fin. Ses recherches le mènent à faire un rapprochement avec Giovanni Arnolfini. Ce dernier, originaire de Lucques (Toscane, Italie), marchand de soies, d’objets précieux et également banquier, vivait à Bruges à l’époque de la réalisation du portrait. Il s’agirait donc d’un portrait de son mariage avec Constanza Trenta. Cependant, d’autres recherches ont montré que cette dernière serait morte en 1433. Aussi, il est impossible qu’une célébration de mariage ait eu lieu en 1434, à moins qu’il y ait erreur sur la personne. Et en effet, on retrouve deux Giovanni Arnolfini dans les archives. Ainsi, si ce n’est Giovanni di Nicolao Arnolfini qui est représenté, c’est peut-être son cousin, également marchand, Giovanni d’Arrigo Arnolfini. Ce dernier a bien été marié. Mais un document découvert en 1997 rapporte qu’il n’a convolé qu’en 1447 avec Giovanna Cenami. Le mystère se poursuit. 

 

Un hommage à une épouse décédée en couches

Une autre hypothèse, plus récente, est que le commanditaire aurait fait réaliser ce tableau à titre posthume, sa femme serait morte en couches. Cela expliquerait les couleurs de « grand deuil », le noir et le violet ainsi que d’autres symboles présents dans l’œuvre comme l’unique chandelle, symbole de la vie, curieusement allumée en plein jour au-dessus du mari alors que celle au-dessus de la femme a coulé et est consumée. De plus, l’épouse est effectivement idéalisée, pâle comme un spectre, on dirait une revenante. Et le fait que les époux ne se donnent pas la main dans le miroir prouverait lui aussi la mort de la dame.

L’histoire de l’art…une histoire sans fin !

Il est indéniable que l’absence de certitudes concernant l’interprétation du tableau engendre un sentiment de frustration. Toutefois, le débat est toujours vif et le sujet stimulant pour les chercheurs. Il n’est donc pas exclu que de nouvelles théories apparaissent. Et en attendant,  faites-vous votre propre avis ou racontez-vous votre propre histoire !

Poursuivons à présent à l’analyse du tableau en nous interrogeant sur les éléments picturaux.

Que dire de la composition ?

La composition de ce tableau s’organise autour des deux personnages principaux qui constituent le premier plan de l’œuvre. L’espace est divisé en deux parties égales ; côté fenêtre, donc donnant sur l’extérieur est représenté l’époux. A sa gauche, proche du lit, élément métaphorique du foyer se tient Madame. Les mains réunies des deux époux se trouvent quasi au croisement des diagonales, au centre du tableau, concentrant l’attention du regardeur sur ce point. Pourtant, l’artiste donne l’illusion que le miroir est au centre du mur, alors que ce n’est absolument pas le cas. En effet, la construction de l’image fait abstraction de l’espace occupé par le lit. Ainsi, tant les mains que le miroir font office de points centraux sans aligner les éléments en rang d’oignons, ce qui aurait probablement rendu la composition moins dynamique. 

Le peintre a choisi un cadrage resserré sur les protagonistes. Laissant peu d’espace à droite et à gauche, il a enfermé le sujet dans la composition. En revanche, les personnages fins, graciles, figés et représentés en pied ainsi que l’espace au-dessus de leurs têtes et la fenêtre coupé par le bord supérieur du cadre apportent un sentiment de forte verticalité mais aussi de solennité et de grâce tout à la fois. Au moyen de ces éléments picturaux, Van Eyck a rendu la composition aussi harmonieuse qu’équilibrée tout en apportant de la puissance à l’ensemble par quelques effets d’asymétrie et de décalage.

Et de la perspective ?

Van Eyck a recherché l’illusion de la profondeur par différents moyens. L’orientation des lattes du parquet et des poutres en s’amenuisant conduisent le regard vers le fond du tableau. L’utilisation de raccourcis, notamment pour les socques dont la pointe est plus ou moins longue en fonction de son orientation, apporte un certain réalisme. On note aussi le respect des proportions et de l’échelle des éléments selon leur position dans la composition et enfin une ébauche de perspective géométrique. Ce dernier élément est encore maladroit puisque le peintre a fait converger les lignes de construction vers plusieurs points de fuite : celles de la fenêtre aboutissent sur le cœur de l’épouse, celles du lit sur le cœur de l’époux, celles du peintre, donc de l’observateur et du reste du décor sur le miroir. Un chercheur a conclu en 2021, après une analyse informatique des points de fuite, que Van Eyck avait utilisé un cadre et un œilleton pour construire sa perspective ; mais qu’au lieu de laisser le dispositif au même endroit, le peintre l’aurait déplacé sur une ligne verticale au fur et à mesure du relevé des lignes principales. Ces « erreurs » n’empêchent en rien la lecture de l’œuvre mais en donne un effet plus symbolique que naturaliste. Le peintre jouera également avec la lumière et les ombres pour modeler les formes et donner du relief aux éléments.

Quant aux symboles : y a un message… ?

La majorité des historiens postulent que les chefs-d’œuvre de la peinture flamande, sont truffés d’autant d’énigmes et de mystères que les cathédrales européennes. Nous pourrions les lire « à plusieurs niveaux ». Même dans les peintures profanes, on pense que Van Eyck utilisait la nature comme une vaste théophanie, c’est-à-dire signifiant la présence, l’émanation de Dieu sur terre et dans notre cas précis, dans les tableaux. D’autres, à l’instar de Lorne Campbell, avancent que Les Époux Arnolfini ne contient pas de clé de lecture symbolique. Cet historien considère que le portrait du couple n’a qu’une fonction de représentation d’une classe sociale : la bourgeoisie. L’aspect hiératique des protagonistes n’est utilisé que pour renforcer l’image de la respectabilité, tout en confortant le rôle social assigné à chacun des deux sexes. L’homme est celui qui pourvoit aux besoins de sa famille. Il a un rôle social, voire politique. Il incarne donc l’extérieur, ce qui explique sa position près de la fenêtre, ainsi que celle des socques pointant vers le dehors. La femme, incarnant le foyer, le domestique, elle est positionnée plus à l’intérieur de la chambre. Sa proximité avec le lit indique clairement ce que l’on attend d’elle ; être une bonne épouse et donc procréer ! 

Et vous qu’en pensez-vous ?

Selon vous, les objets apparaissant dans le tableau ne sont que les attributs de l’aisance sociale des protagonistes ou des symboles à caractère religieux et moral ?

Pour faciliter votre prise de position, vous trouverez une liste des principaux éléments représentés dans l’œuvre de Van Eyck et leurs symboliques potentielles. A vous de décider !

Éléments 

Interprétations suggérées 

Les oranges sur la table basse 

Produit de luxe pour souligner la prospérité économique du commanditaire ou fruit rappelant l’innocence d’avant le péché originel ?

Le chien au pied du couple

Fidélité du couple ou animal de compagnie ?

Lustre avec une bougie allumée en plein jour

Allusion à la vie ou signe extérieur de richesse et couple n’accordant aucune attention au coût élevé des consommables ?

Le miroir sur le mur du fond 

Vanitas ou moyen innovant de montrer l’envers du décor ?

Le rouge du lit conjugal, le vert de la robe, le bleu de la blouse

Le rouge pour l’union parfaite de l’homme et de la femme en vue de maternité, le vert pour l’espérance et le bleu pour la fidélité ou juste des couleurs en usage et à la mode de l’époque ?

Les socques sales de Monsieur et les pantoufles bien propres de Madame et puis une brosse à épousseter 

Chaussures que l’on n’enlève dans les lieux sacrés ou démonstration que rien ne dépasse, que tout est propre en ordre, que Madame est restée à l’intérieur pour faire le ménage pendant que Monsieur est sorti faire ses affaires et ramener de l’argent à la maison !

 

À vous d’aller plus loin !

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